La télé japonaise
Aujourd'hui je n'ai pas eu cours, à cause du typhon. Et pourtant, c'était loin d'être la tempête à Tôkyô ! De temps en temps il y avait des rafales, mais on pouvait quand même tout à fait marcher dehors sans problème... Je me suis souvenue d'une fois il y a environ 10 ans au bord de la mer où le vent était tellement violent que les gens avaient du mal à avancer, et que les oiseaux qui tentaient de résister étaient littéralement projetés 5 mètres en arrière... Là ça n'avait rien à voir, au contraire j'ai trouvé qu'il faisait meilleur qu'hier. D'après ce que j'ai vu à la télévision, c'est surtout dans les préfectures d'Aichi et de Mié qu'il y a eu des dégâts (tuiles qui s'envolent, baies vitrées qui explosent, cours d'eau qui débordent...).
A ce propos, j'ai justement décidé aujourd'hui de vous parler de la télévision japonaise ! Je la regarde pas mal en ce moment car c'est un bon entraînement à la compréhension orale. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il y a des choses intéressantes, et d'autres beaucoup moins... Comme en France me direz-vous, mais ce n'est pas de la même manière. Je ne prétend pas proposer un panorama exhaustif de toutes les chaînes de télé japonaises, mais d'après la dizaine de chaînes que j'ai, certaines caractéristiques ressortent particulièrement.
Première chose qui frappe à la télévision japonaise : ça parle tout le temps... de bouffe. Mais à un point vraiment impressionnant. Quelle que soit l'heure du jour et de la nuit, il y a forcément une émission qui a trait d'une façon ou d'une autre à quelque chose qui se mange :
Ici, vous pouvez voir un extrait d'une émission où nos courageux héros vont devoir manger du "shabushabu" (un plat de viande japonais) à volonté. S'ils en mangent assez pour que ce ne soit pas rentable pour le restaurateur (en noir, à droite), ils gagnent !
Pour être bien sûrs de ne pas perdre, les deux animateurs ont amenés Gal Sone (ギャル曽根), une fille qui si je ne m'abuse gagne sa vie en participant à des concours de gros mangeurs et en apparaissant à la télé. Elle a un appétit incroyable, c'est vraiment un ventre...
Là, alors que ses collègues masculins ont déclaré forfait à la troisième assiette, elle en est à sa quinzième (on la voit toucher la pile, qui finira par la dépasser...). Au final elle ira jusqu'à une vingtaine d'assiette, c'est-à-dire environ 2,6 kilos de viande ingurgités en un peu plus d'une heure ! Le restaurateur s'avouera vaincu, et expliquera comment il fait pour obtenir de la viande à si bas prix...
Dans ce genre d'émission, il y a toujours plein de gens qui n'ont rien de particulier, mais qui sont payés pour assister en tant qu'invités aux émissions et sortir des blagues/s'extasier sur tout ce qui est dit par l'animateur. C'est ce qu'on appelle les "talent" (タレント), en anglais dans le texte (que vous pouvez apercevoir sur les photos ci-dessus dans le petit carré en haut à gauche). J'avoue ne pas bien comprendre leur utilité... Encore les "talent" étrangers (il y en a un certain nombre, souvent américains mais pas seulement) peuvent apporter une vision des choses différentes, mais alors les japonais qui n'ont rien de plus que le Japonais moyen dans la rue... Un exemple d'émission avec uniquement des "talent" :
Tiré d'une émission sur Michael Jackson, apparemment... Tous les hommes que vous voyez sur le côté gauche, ce sont des "talent". Ce ne sont pas des chanteurs, pas des acteurs... En fait leurs hauts faits sont comparables à ceux des anciens participants d'émission de télé-réalitétélé-réalité en France, du genre Steevy ou Loana... Sauf que Steevy au moins est chroniqueur dans une émission si je ne m'abuse, donc il a quand même une certaine importance dans le fonctionnement de celle-ci, alors que là on dirait juste qu'ils se ramènent à l'émission, s'assoient, et sortent des "aaaaaaaaah", "vraiment ?", "c'est incroyable !" etc. au bon moment.
Voilà, donc ça c'était pour le chapitre "émissions de divertissement". Mais il y a également des séries ! Pas spécialement de séries étrangères à ce que j'ai pu voir, et c'est bien dommage, parce que personnellement je trouve les séries télé japonaises ("dorama", "ドラマ" en japonais) irregardables, à quelques rares exceptions près qui pour le coup sont vraiment bonnes. Je ne parle même pas là du contenu, mais rien que la manière dont c'est filmé, c'est pas possible, je ne tiens pas plus de 2 secondes. Et pourtant, jamais je n'aurais cru avoir des goûts d'esthète en ce qui concerne le cinéma... Juste quelques images pour que vous compreniez un peu ma douleur (ah oui, au Japon ils aiment bien faire la promotion d'une série en racontant toute l'intrigue dans ses moindres détails lors d'une émission avec des "talent" ! Là c'est une série qui s'appelle "Mr Brain" apparemment, et pour changer on peut voir la réaction des "talent" en découvrant les images de la série dans le carré en haut à droite...) :
Je vous résume l'intrigue (car oui, pour vous pondre un article convenable sur la télé japonaise, j'ai attendu tout l'émission de pouvoir prendre les photos les plus représentatives d'une série nippone digne de ce nom ! Moyennant quoi je sais tout sur cette fameuse série...) : la police fait appel au héros (ici en bleu, en train de se prendre la tête avec un subalterne qui n'apprécie pas d'être commandé par plus jeune que lui, si mes souvenirs sont bons), un génie travaillant à la tête d'une équipe de scientifiques en blouse blanche, pour élucider une affaire de meurtre...
Non mais franchement, regardez-moi ça. Le plan, l'air que prend le mec... Vous avez pas envie de zapper direct ?
Pour les filles : je crois que le mec est sensé être beau gosse, car en Asie on considère souvent comme "beaux" les hommes qui ressemblent à des femmes (je pense par exemple à Kimura Takuya, que l'on voit en permanence dans toutes les pubs...), avec cheveux longs, traits féminins, petite carrure et compagnie. Moyennant quoi y'a que les acteurs qui jouent des rôles de yakuza qui ressemblent à des hommes !
Voilà donc le premier type de série à la japonaise. Mais cet article ne serait pas complet sans les "djidaï geki" (時代劇), c'est-à-dire les séries de cape et d'épée, ou plutôt de kimono et katana en l'occurrence... Je vous mets des extraits de celle qui reste sans doute la plus célèbre : "Mito Koomon" (水戸黄門).
Le vieux monsieur en orange, c'est Tokugawa Mitsukuni, le personnage principal de la série. Tokugawa Mitsukuni a vraiment existé, c'était le petit-fils du Shôgun Tokugawa Ieyasu ainsi que le daimyô (c'est-à-dire seigneur féodal) du fief de Mito durant la seconde moitié du XVII° siècle. Dans la série il voyage de villages en villages déguisé en roturier pour rétablir la justice. Ici on le voit rencontrer pour la première fois le gamin dont il va aider la famille dans la suite de l'épisode. Derrière,en bleu, on peut voir les deux samuraï qui l'accompagnent dans tous ses voyages : Suke-san et Kaku-san.
Le héros demandant un service à Kagerô Ogin, une kounoitchi (= femme ninja) qui l'aide à chaque fois qu'il a besoin de quelqu'un pour espionner/régler son compte à un ennemi. Tout cela dans le but de rétablir la justice, évidemment !
A la fin de chaque épisode vient le moment où le "inrô" (c'est-à-dire une petite boîte que les hommes de l'époque Edo portaient sur eux, attaché à la ceinture de leur kimono) de Tokugawa Mitsukuni est présenté aux méchants, révélant ainsi par la présence du sceau des Tokugawa la véritable identité du héros. A ce moment-là tous les méchants s'écrasent littéralement (comme vous pouvez le voir ci-dessus !), et supplient leur seigneur de leur pardonner leurs mauvaises actions
Tout est bien qui finit bien, et notre héros se remet en route vers de nouvelles aventures ! Ce qui est assez drôle avec ce genre de séries "d'époque", c'est de voir tous ces gens vivre à l'ancienne et surtout parler comme des vieux ! Mais je doute que la réalité historique soit bien respectée, car forcément il faut bien rendre glamour une époque qui ne l'est pas forcément par certains aspects...
Avec tout ce que je viens de vous présenter, on a déjà bien 75% de ce que je vois en permanence à la télé... Mais n'oublions pas non plus :
- le télé-achat (24h/24, 7 jours/7 sur deux de mes chaînes !)
- les émissions parlant de la grippe A et de la manière d'y échapper
- les émissions sur le shôgi ou le igo (appelés en France respectivement "échecs japonais" et "jeu de go")
- Les films américains doublés en Japonais ! Il n'y en a pas très souvent, mais quand ça passe j'aime bien regarder... Tous les hommes occidentaux sont doublés avec des voix "viriles", très graves, trop même, tandis que les femmes occidentales ont toutes des voix de femme fatale en Japonais !!! Tant mieux, je préfère ça que l'inverse...
- Les émissions parlant des handicapés. Il y en a une sur laquelle je tombe régulièrement, où l'un des animateurs est handicapé lui-même. Ils font des reportages sur des jeunes avec toutes sortes de handicap, physique ou mental, leur demandent de leur parler de leurs problèmes, de comment ils y font face, et de leur "rêve", ou "youmé" (夢) en Japonais, mot très important !!! Ici, ce n'est pas du tout incongru de demander à quelqu'un quel est son rêve... Personnellement je serais bien embêtée pour répondre à cette question, parce qu'encore "quel est ton projet d'avenir ?" ça va, mais utiliser le mot "rêve" ça me semble tellement fort comme sens que je ne saurais pas quoi dire à part des choses irréalisables... Mais c'est peut-être le but pour après pouvoir "faire de son mieux", "gambarou" ("がんばる") verbe TRES important en Japonais ! On l'emploie tout le temps, ne serait-ce que pour dire "Bon courage", qui se dit en Japonais "gambatte", "がんばって", littéralement "fais de ton mieux". Bref, tout ça pour dire qu'il y a pas mal d'émissions qui mettent en valeur les handicapés, et que ça doit être plus facile à vivre d'être handicapé au Japon qu'ailleurs, car les gens et les médias ont vraiment l'air de penser à eux. Par exemple à la télé encore, tout est sous-titré, il y a des éditions de journaux d'informations en langage des signes, et des émissions entières consacrées au handisport et aux paralympiques.
Voilà ça y est, vous savez tout sur la télé nippone ! Personnellement je regrette beaucoup l'absence d'une chaîne type Arte avec tout plein de documentaires dedans (mon type d'émission préféré, et en plus ça serait sans doute d'un vocabulaire plus riche que les émissions de "talent"...), mais bon, pas le choix. Ici aussi les documentaires existent, mais la plupart du temps... ils parlent de nourriture ! Ou de trains. Dommage !